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23 mars 2023 4 23 /03 /mars /2023 23:07

La charité en Auvergne durant l’horrible famine de 1694[1]

 

La charité privée ne pouvait plus suffire désormais à secourir tous les malheureux ; le gouvernement dut intervenir. Il employa les indigents à des travaux de terrassements et fit ouvrir dans les villes des ateliers où les hommes gagnaient 4 sols, les femmes 3 sols et les enfants 2 sols par jour[2]. Les gens riches ou simplement aisés ne s’imposaient pas moins de sacrifices volontaires et beaucoup recueillaient les pauvres chez eux. Les registres de la paroisse de Saint-Genès à Thiers portent, à la date du 25 mars 1692, la mention suivante : « Cejourd’huy, le vicaire soussigné a enterré un pauvre de la paroisse de Vollore dont on ne sait pas le nom, mort chez Monsieur Guillemot, marchand de cette ville, lequel, après l’avoir bien retiré et nourri dans sa maison, l’a aimé jusqu’au tombeau avec toute sa famille, comme il eust esté un de ses enfants. »

Les dames de Clermont formèrent des comités de secours par quartiers, constituèrent des bureaux de charité et firent chaque jour des visites à domicile. Des citoyens zélés se réunirent au palais épiscopal sous la présidence de l’évêque, Mgr Bochard de Saron, et avisèrent aux mesures à prendre pour conjurer le péril. Une commission de bienfaisance se forma et il fut arrêté que tous les lundis elle tiendrait séance à l’évêché[3]. Un généraux dévouement s’emparait de tous ceux qui pouvaient faire le bien, une noble émulation pour le soulagement de tant de misère, animait tous les cœurs.

A Riom, le Conseil de ville décide, le 4 mai 1693, que « vu le grand nombre de pauvres nécessiteux jetés dans la ville, il sera nommé vingt-quatre commissaires pour les quatre quartiers, soit six commissaires par quartier, lesquels feront la visite auxdits pauvres et ensuite verront de quelle manière on pourra les secourir. »

Le 22 du même mois, le Conseil se réunit de nouveau et délibère sur l’emploi à faire des fonds et des aumônes recueillis par les commissaires de quartier : « Il est résolu que l’argent que les sieurs commissaires ont amassé sera mis ès-mains de M. Sirmond, et le blé ès-mains de M. Autier ; que mardy, 26 du mois de may, on commencera à faire la distribution du pain, ensuite sera laissé à la prudence des consuls qui soulageront les Dames de la Miséricorde, lesquelles sont priées de distribuer de la soupe aux pauvres[4]. »

Le clergé, tant séculier que régulier, se montra, dans ces circonstances difficiles, à la hauteur de sa mission de bienfaisance et d’abnégation ? L’évêque de Noyon de frapper les gens d’église d’une taxe extraordinaire, déclarant que « c’est en de pareilles calamités que les ecclésiastiques doivent mesme prendre sur leur nécessaire pour subvenir aux besoins publics[5]. »

Les malheureux trouvaient à la porte des monastères de larges et abondantes distributions de pain. Les Chartreux de Port-Sainte-Marie méritèrent d’être appelés les pères et les protecteurs des pauvres. Les Bénédictins de Saint-Alyre nourrirent pendant longtemps plus de quatre mille personnes par Jour[6].

Les habitants de Saint-Rémy, près Thiers, ne sauraient oublier non plus le généreus dévouement dont fit preuve leur curé, Melchior Chossier, à l’égard des pauvres de sa paroisse. Dans l’espace de deux mois, plus de soixante personnes étaient mortes de « pure faim » dans le seul lieu de Saint-Rémy. On était en février 1694 et l’on craignait que jusqu’à la moisson « le cherté des blés, jointe à la cessation du travail et du négoce, n’enlevât plus des deux tiers des habitants. »

On avait bien, en exécution de l’arrêt du Parlement du 20 octobre 1693, établi un rôle de contributions pour le soulagement des indigents, « mais la somme imposée est si modique, dit une délibération des habitants de Saint-Rémy, en date du 7 février 1694, attendu le grand nombre de pauvres de la paroisse qui s’augmente de jour à autre, qu’à peine se trouvera-t-il une bouchée de pain pour chacun de ceux qui s’abandonnent à la mendicité, et, à moins qu’il n’y ait quelque personne d’autorité dans le bourg qui ait l’intelligence et le discernement pour distribuer les aumosnes à propos à ceux qui en ont le plus besoin, le tout ne tournera qu’à une extrême confusion[7].

Dans cette pénible situation, on a recours au curé qui, « depuis quatre ou cinq ans, ne cesse de faire des aumosnes et par exprès entretient plusieurs orphelins auxquels il a sauvé la vie, les ayant retirés, nourris et habillés chez soi-mesme, leur apprenant à travailler. »

 

La semaine Religieuse du 22 mars 1879

 

[1] Travail d’Elie Jaloustre lu à l’Académie de Clermont et publié dans les mémoires de cette société.

[2] Correspondance des Intendants, n° 1160.

[3] Archives municipales de Clermont ; délibérations du 14 avril 1693 et du 25 février 1694.

[4] Archives municipales de Riom.

[5] Lettre au contrôleur des finances, du 15 janvier 1694. Correspondance n°1160.

[6] Lettres de M. Vaubourg, des 18 mai et 6 juillet 1694, n° 927.

[7] Saint-Joanny, Histoire de la coutellerie Thiernoise ;

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