Voici les notes du curé de Deneuille (Alliier). Il mentionne les intempéries qui se sont produites en fin d'année 1787 et l'année 1788. Ce sont certainement à cause d'elles qu'une révolution aura lieu quelques mois plus tard. On peut penser qu'il y a eu le même genre de temps sur la paroisse de Saint-Priest-des-Champs.
1788 à Deneuille-les-Mines
La misère a été grande sur la fin de cette année ; en décembre le bled a valu onze écus la charge. Cette calamité a été occasionnée par l’intempérie des saisons : les grandes pluies de l’automne précédent avaient empêché de semer en bien des endroits et avait nuit aux semailles qu’on avait faites avec beaucoup de difficultés ailleurs, l’hiver ne fut pas moins mouillé, le printemps s’en sentit ainsi qu’une partie de l’été ; de manière que la récolte n’était pas suffisante pour nourrir le royaume un tiers de l’année. Heureusement que les riches avaient fait d’en avoir du bled, car sans ces provisions qui paraissent avoir été ménagées par la providence. Cette denrée de première nécessité serait montée à un prix excessif.
Mais le malheur du temps ne s’est pas borné à la disette et a augmenté par un hiver des plus vif qui se soit fait sentir de mémoire d’hommes : le froid a commencé à la mi-novembre, à la suite d’un automne beau mais très sec, il a continué jusqu’à la mi-janvier suivante : les arbres ont éclaté, les genets, les houx ont gelé, et la glace a été en bien des endroits de quinze à dix-huit pouces, le poisson a péri dans bien des étangs ; et sous l’abondance de neige qui couvrait les bleds, nous avions à craindre de voir renouveler la catastrophe de 1709. Ce n’est pas encore tout, à peine trouve-t-on en plusieurs endroits de l’eau pour abreuver les hommes et les bestiaux, encore moins pour moudre ; ici cependant, grâce à notre fontaine, ce fléau n’est point tombé sur nous : mais les villes qui sont approvisionnées par les rivières ont beaucoup souffert ; parce que le cours en été interrompu par la gelée. De manière qu’avec de l’argent, on ne pouvait se procurer du pain. Cependant le moulin d’Eclaine n’a pas discontinué son cours et a servi à alimenter les paroisses voisines.
Le vin n’a pas été si cher, à beaucoup près que le bled, à l’époque dont je parle, il ne valait que trente à trente-trois livres le poinçon dans ces pays-ci ; ailleurs il est monté un peu plus haut ; mais il était bon partout : Néanmoins, au moment ou j’écris cecy on parle d’augmentation : parce que l’on craint que la vigne ne soit gelée en partie, et on ne sera pleinement rassuré ou tout à fait déconsolé à l’égard de ce nouveau désastre, que qu’en on commencera à la tailler. Enfin pour finir ce que j’ay observé sur cette malheureuse année, elle fera augmenter la fortune de peu de monde ; et elle en a déjà ruiné beaucoup ; nous espérons que la suivante ne luy ressemblera pas, parce que les bleds en ce pays-ci sont très beaux : mais dans le Berry, par exemple, et dans les autres pays de terres fortes, on a semé le quart de ce qu’on se proposait, à cause de la sécheresse de l’automne.
J’oubliais de remarquer qu’il y eu beaucoup de glands, faible dédommagement, parce qu’on n’a pas eu un grand débit de cochons, par défaut de consommateurs, le pain étant plus recherché que la viande.
Deneuille-les-Mines série du greffe 89 E Dépôt GG pages 119 et 120